Deux grands maîtres de la création singulière, Louis Pons et Georges Bru exposent à Marseille.
Louis Pons, récemment disparu, n’a rien à voir avec les poncifs de l’art contemporain. Barbare du regard, sauvage égaré dans les marges de la modernité, Louis Pons est rural et médiéval, avec des relents momifiés de magie scabreuse.
Son art relève de la mise-à-sac, ou de la brocante vagabonde. On voyage dans le poison des caves de l’âme, dans le labyrinthe des objets à jamais abîmés dans les greniers des souvenirs. Ses œuvres sont les éclats émiettés d’un reliquaire infini. On dirait des tombeaux d’humanité creusés dans un domaine enchanté. On y respire un air aigre où le dehors vivifiant importe peu. On voit des surgissements incongrus, des fouillis bizarrement organisés et de somptueux théâtres de la transgression où les objets participeraient tous au même rituel.
Entre le sublime et ses débris autrefois épars, ce féticheur discret crée des liens surprenants. Pons est un fabuleux archéologue du rebours : dans la réalité crue du fantasme, des créatures à l’ironie monstrueuse sont les figures extasiées et grinçantes de ses implacables totems.
Aux écoutes des scènes majeures enfouies aux sources du dedans, Georges Bru, l’un des grands créateurs de dessin de notre temps, franchit vers le bas les interdits qui barrent l’accès au réel ancien et scandaleux de l’animale humanité… Un espace envoûté cerne les corps, et les corps sombrent dans l’espace. Chacune de ses créatures, visage écrasé de mystère, naît d’un espace sans fond, corporéité fantasmée, nouée et fluide, larvaire et dilatée, et bouleversée de tensions charnelles. Laiteuse et compacte, esquissée, boursouflée, épaissie, la chair de Bru, d’une densité maléfique, se marque d’ombre et de brume.
Flottent un air d’absence, une atmosphère de maléfice, de soufre et de bouffonnerie. Une eau de gouffre. Au creux de la délicate obscénité qui anime sa scénographie dépouillée, s’ajoutent les puissances chaotiques d’un corps premier et larvaire qui serait la trame cachée de tous les suivants. Le vertige repose sur le malaise. Le malaise couve sous le vertige. Bru creuse leur apogée respective. L’univers est d’enfermement mais Bru, magicien des surgissements arrêtés, a laissé une vague lumière de lune morte, et aucun battement de ciel pour la joie… Exhibant les dessous des cultures, Georges Bru étreint l’espace…
Jusqu’au 24 avril 2021 Galerie Polysémie – Marseille (13)
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