L’esthétique du trouble, du non-dit, de l’altérité et des vacillations du réel est peut-être la donnée majeure de l’art contemporain qui en présente souvent une expression paroxystique. Alain Mons, professeur en sciences de la communication et arts à Bordeaux Montaigne, travaille sur l’esthétique généralisée dans le rapport aux images, aux corps, et les représentations de la ville à travers les mutations actuelles des perceptions et des affects.
Ce livre solide est une approche plurielle, remarquablement détaillée, de l’expérience du trouble née d’œuvres diversifiées qui font vaciller l’approche du réel, de la littérature au cinéma, ou de l’installation à la vidéo, tout ce qui caractérise l’émergence d’un monde paradoxal : “Ce qui apparaît tend à faire disparaître.” (Pierre Hadot).
“Les arts ou la pensée dans ce qu’elle a de plus dérangeant peuvent nous troubler par la déstabilisation des codes et des modèles qu’ils créent, envisageant d’autres façons de voir et d’interpréter, ils rendent instables nos certitudes, nos croyances, affolent nos habitudes, nos repères normatifs de penser ; ils chamboulent nos perceptions et nos représentations.” écrit Alain Mons dans une phrase clef de son riche préambule. Comme si l’art établissait le plus juste diagnostic des affres de la modernité. Si la création atteint de plein fouet l’artifice des cultures installées, c’est que nos réponses ont échoué, et que nos certitudes s’achèvent. La raison seule n’étreint pas l’univers. Et si le déferlement qui formate les esprits ne cesse de s’étendre, quelque chose tourne à vide, et le vide croît. Toute communication est déperdition. Les cultures s’efforcent en vain de cacher l’irrespirable fragilité de la vie, et l’impensable de son poids.
Éditions Liber – 22 €
Collection “L’imaginaire et le contemporain”