Roger-Edgar Gillet (1924 – 2004) aurait eu 100 ans cette année… Le prénom Edgar lui est attribué par sa ressemblance avec Edgar Poe ! Sa dense peinture, saisissante et crue ignore les bassesses des images séductrices, et quelques-uns des monstres en création du vingtième siècle font partie de son sérail d’amitié : Alechinsky, Bitran, Dodeigne, Doucet, Marfaing, Poliakoff, Messagier ou Rebeyrolle ! Et de grands noms ont écrit sur lui, de Camille Bryen à Jean Fautrier, et sa fille Marion reprend le flambeau de sa juste reconnaissance. En 1998, une association, présidée par Lydia Harambourg, est créée pour gérer, avec Marion, l’exceptionnel fonds Gillet.
Ce prince de la haute peinture est un phare enfoui, un repère d’absolue certitude créatrice, une évidence mauve et terreuse. Ses faces à gueule de terre ancienne, aux allures de boue archaïque, écrasent nos pâleurs, et font fête féroce à toutes les apparences de surface. Le grotesque ténébreux, truculent et paillard, festif et jaculatoire, s’empare à vif et à cru de tout l’espace de la toile, comme échappé d’un sombre banquet saccagé. Chez lui, l’implacable figure humaine, sacrale et prodigieuse, prend l’espace à son compte, et l’accidente. Peu de couleurs, donc, épaisses et denses, assourdies et latentes, lascives comme des laves.
Veilleur d’une interminable nuit écrasée d’opacité, jubilatoire et cruelle, Roger-Edgar Gillet a le cœur lourd et la fête nocturne. Le grotesque chez lui tient le premier rôle et fait la nique aux beautés fabriquées. Constante et modeste, sa transgression jouissive et violuptueuse est secouée par l’appétit féroce d’une peinture envoûtée, goguenarde et drôlatique.
Drôles de têtes et drôles de cous qui s’allongent et se durcissent vers les hauteurs, dans le dur silence des ténèbres. Roger-Edgar Gillet, qui fabrique ses peintures, peint à mains nues, et chaque œuvre est une apparition. La terre s’est soulevée pour donner naissance à des êtres sans origine, sans culture, et sans identité. La modernité ne les fascine pas, ne les concerne pas, et ne pourra les asservir. Ils sont libres d’exister !
Jusqu’au 27 juillet 2024 Galerie Nathalie Obadia – Paris 8ème
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