Plusieurs expositions en France ont fait connaître ce superbe photographe sibérien, à Troyes, il y a 25 ans, au Mans, à Nantes, à Thonon, à Paris…
Travail à l’ancienne, sans ordinateur, sac au dos dans des lieux lointains qu’il parcourt à pied. Un jour à regarder sur place, près du lac Baïkal, une seule photo par jour, avec un vieil appareil russe.
L’imaginaire d’Anosov est simple et nu comme la steppe. Il est d’une profondeur d’horizon, empli de la force des éléments premiers de la nature : la roche, l’arbre, le nuage. Et ces éléments reliés, plutôt que séparés.
Il n’y a aucun ancrage dans le pittoresque sibérien, il n’y a pas de séduction immédiate de l’insolite local, mais la volonté d’unir la condition humaine aux puissances élémentaires de l’univers. A peine peut-on pressentir, dans la tension des contrastes, une dramatisation flottante, la proximité d’une tragédie, la présence intime des contradictions qui agitent la vie profonde.
Sur le fragile support d’un simple papier de photographie, ce n’est pas l’extinction des forces vitales que montre Alexandre Anosov, mais l’éveil renouvelé de ce qui transforme l’univers : ce qui rapproche l’arbre de la roche, l’éphémère nuageux du silence des grands espaces et le mariage des puissances qui rendent la terre habitable. Grandiose subtilité des noirs et des gris. Infinie présence d’une beauté méditée et distancée.