En pleine nature, sinon en pleine cambrousse attachante et classieuse, la Galerie Égregore, l’une des belles galeries du pays, dirigée de main de maître par Jean Guérard, propose un ensemble de haute qualité, pluriel, ouvert et attachant. 10 artistes se partagent les quelque 1000 m2 de l’ensemble, chacun bénéficiant d’un vaste espace aéré qui met en valeur la singularité de chacun.
Les sensibles sculptures en bronze de Ruta Jusionyte ouvrent le bal. Elle sait travailler la terre, sa terre natale en elle travaille, comme l’ancestrale culture des côtes baltes. Ses êtres indicibles, poignants et soignants, ont la sourde nostalgie des sources vives, des mythes intimes et des légendes secrètes.
Venu de la lointaine Sibérie, l’imaginaire d’Alexandre Anosov, formidable photographe, est simple et nu comme la steppe. Il est d’une profondeur d’horizon, empli de la présence des éléments premiers de la nature, la roche, l’arbre, le lac et le nuage, avec la volonté de s’unir aux énergies élémentaires de l’univers.
De chromatiques splendeurs, très pudiquement retenues, implosent lentement dans l’espace ultime et décanté de Benoît Trimborn. On dirait ses couleurs lavées par l’eau du ciel. Dans le profond du féminin de l’eau et dans la nostalgie de l’unité perdue.
Chez Christine Jean, les couleurs ne saignent pas. Elle délivre leurs reflets en murmurantes modulations, en calme intensité, en vibrations subtilement répétées, toujours au cœur d’une abstraction habitée. Nourrie de culture asiatique, elle déshabille l’art de ses oripeaux charnels et de ses excès gestuels.
Quand la lave humaine sommeille dans les profondeurs bloquées, David Géry assène la singularité terrifiante et fabuleuse du ressenti archaïque. Explorateur d’un resserrement chromatique inouï, dans la tension exacerbée du bleu assourdi et du noir absolu, il creuse des trous dans la lumière.
Chargée jusqu’à l’os, la peinture de Jean-Philippe Domecq absorbe tous les dehors et irradie tous les dedans. Ses couleurs sont comme retournées sur elles-mêmes. Saisies à la gorge, elles ne se répandent jamais. Elles surgissent en paysages de destin, implacables et nus, où les faiblesses trop humaines n’auraient pas de place.
“Dans ses bas-reliefs “ébat-reliefs” plutôt, Valérie Rossignol parvient à rendre visiblement palpable ce qui absorbe deux corps qui s’adonnent l’un à l’autre depuis l’aube des temps », écrit J-P. Domecq sur les fines sculptures de l’artiste.
S’ajoutent encore, au gré d’une riche déambulation, les sculptures implacables, magiques et puissantes de Jean-Louis Tartas, les âpres, fortes et saisissantes peintures de Damien Teyssandier, de Marmande, et les très fines abstractions, riches de mystère incarné, de Jean-Louis Thomasson.
Hors l’actuelle exposition, mais présentes au cœur de la vaste demeure exposante, les délicates sculptures de Catherine Guérard, dans l’immense respect de la sculpture universelle, savent dire à vif la pure présence des corps, leur présence décantée, retenue et généreuse, et l’énigme bouleversante de nos miroirs de chair. Au dehors, fabuleuse présence des grandes pièces sculptées de Rémy Trotereau.
La galerie Égregore prépare un concours national centré sur la pure beauté vivante…
Galerie Égregore – Jusqu’au 24 novembre 2024
Visite atelier Christine Jean – Du 3 au 5 octobre 2024 – Paris 12ème
