Exposer Botticelli à Chambord, selon Pierre Dubreuil, directeur général du Domaine national de Chambord, « c’est permettre la rencontre de deux monuments emblématiques de la Renaissance : l’un des plus fameux peintres du Quattrocento florentin et le château bâti par François Ier, grand admirateur de l’art italien », ami personnel de Léonard de Vinci dont les travaux ont influencé l’architecture du château et son célèbre escalier à double révolution.
Faire entrer l’art italien, c’est aussi, selon le vœu exprimé par les équipes de conservation, une réponse à la préoccupation des visiteurs, qui, « dans cette grande coquille vide » peuplée de salamandres, cherchent la mémoire du grand roi et de son époque. Période alors d’intense renouveau de l’activité artistique dans le Val de Loire, après la période sombre de la Guerre de Cent Ans.
L’exposition, dans la chapelle du château, se compose de deux chefs-d’œuvre, deux représentations de « La Vierge à l’Enfant avec lejeune saint Jean-Baptiste ». Soit la toile originelle de Sandro Botticelli (1445-1510), protégé des Médicis, provenant du Palazzo Pitti, prêtée exceptionnellement par la Galerie des Offices de Florence (galerie palatine) et un tableau similaire, trouvé fortuitement dans l’église Saint-Félix de Champigny-en-Beauce, dans le Loir-et-Cher. Au terme d’une série de passionnantes recherches pluridisciplinaires, en histoire de l’art, en sciences des matériaux constitutifs, en particulier au sein du laboratoire de pointe du C2RMF, le tableau, initialement daté du XIXème, a été récemment reconnu comme une œuvre authentique.
Les deux tableaux sont peints a temperaet à l’huile avec des pigments utilisés au XVème -XVIème siècles. Ils ont été réalisés sur toile et non pas sur un panneau de bois, sans doute pour être brandis au cours de procession. Les variations dans l’arrière-plan et l’inversion du groupe de personnages évitent la répétition, et donnent un éclairage sur les pratiques d’un atelier (bottega) de la Renaissance, et sur la manière dont les artistes florentins multipliaient les représentations de la Sainte Famille. Le délicat dessin de Champigny n’a pas été exécuté à main levée. Il a été reporté à partir du modèle selon la technique du spolvero, uncalque percé de trous d’aiguilles et tamponné au noir de carbone, ce qui permet de transférer le tracé des personnages sur la nouvelle toile. Botticelli étant à la tête d’un atelier très productif, plusieurs artistes sont intervenus dans la création. Le tableau est une œuvre d’atelier postérieure au modèle, sur laquelle le maître est intervenu lui-même aux côtés de ses élèves. « La réplique » de motifs était courante, la main du « maestro », reconnaissable dans les lignes de contours du délicat visage de la Vierge et dans le jeu subtil de courbes et contre-courbes, garantit l’authenticité de l’œuvre.
La Madone de Champigny est accueillie pour quelques années à Chambord, haut-lieu de la Renaissance, puis retournera dans l’église de Champigny-en-Beauce. Rappelons que les objets conservés dans les églises et appartenant aux communes sont protégés et documentés sur la plate-forme du Ministère de la Culture : POP, plate-forme ouverte du patrimoine, base Palissy.
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