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On en parle

David Daoud ou la lumière des ténèbres

Christian Noorbergen, le 11 avril 2019

Symboliste exacerbé, expressionniste romantique, peintre de l’exil ou de la dure présence, David Daoud absorbe les clartés du dehors et se joue des clichés.

Il œuvre au-dedans du dedans, et l’or des souterrains, masqué et broyé, illumine ses hauts-fonds. Les âpres soubassements du mental portent ses territoires de création, et ses peintures, fiévreuses et nocturnes, creusent leur dur sillon, où les plus humbles, les anonymes et les lointains ont droit de cité, fussent-ils égarés et fantomatiques, et comme noyés dans la nostalgie d’une lumière disparue. Histoire intime portée par les remous de la grande histoire des hommes.

Et ces apparences d’humanité fragile vagabondent dans l’opacité illimitée de l’univers. Chargés cependant d’inépuisable énergie, elles ne peuvent disparaître. Le corps en exode est vêtu d’espace peint, riche d’épaisseur vitale, qui semble sourdre du profond de la toile. David Daoud creuse à mains nues les décombres des surfaces, et ses creusets d’étrange lumière, toujours tapissés de ténèbres, épousent les grands silences de l’univers.

La grotte d’origine et la crypte sacrale, archaïque et dépouillée, font fragile demeure partagée. Des pénitents d’outre-monde traversent l’abîme, et des traces humaines tressaillent sans fin dans la nuit. Ce sont des esquisses d’être. Des traces d’avenir. De frêles voiles de couleurs, valeurs éphémères et passantes, bouleversent l’obscurité, et ces éclairs ténus éblouissent l’étendue, dans l’âpre proximité d’un Goya inoublié. La source cachée d’un drame latent, plus que l’apparente unité de la couleur, assure l’harmonie piégée d’une œuvre toujours aux limites de la disparition. L’émotion, comme une exécution, est capitale. Des crispations de matière, dans la touche si apparente de sa peinture, signent la présence allusive et retenue des meurtrissures vitales. Le crépuscule et l’aube s’étreignent. La lumière s’étouffe de ne plus croire aux miracles du jour.

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La base de l’œuvre est subtilement graphique, quand même s’avancent, en pure peinture, des teintes brunes, mordorées ou d’un bleu-gris équivoque et ouaté. Dans cette sourde et sidérante scénographie, dans cette prolifération d’absolue liberté, s’agitent les esquisses dénoncées des pantins du monde. 

Le dessin, chez David Daoud, sait vivre seul. Grandiose, dominant, aérien, aigu, acéré, et prodigieusement inventif. Haute frontalité, fluide et souveraine.

Jusqu’au 9 avril 2019 – « Errances poétiques« 
Galerie du Jansanet – Troyes (10)

Du 10 mai au 30 septembre 2019 – « Empreintes« 
Paris 17ème
www.daviddaoud.com