En pénétrant dans la Collégiale Notre Dame, nous avons été éblouis par la majesté du lieu. Comme l’homme peut-être grand quand il laisse parler son âme ! Nous sommes à Ribérac en Dordogne au coeur du Périgord Vert pour le Salon Un Fragment d’Art 2024.
Nous avons nommé Yann Yvinec alias Hyane pour le Prix Aralya. Ses hyènes sautaient littéralement à la figure des visiteurs. Elles occupaient l’espace avec une autorité picturale impressionnante. Suivez-nous dans le bonheur d’une de ces rencontres humaines tellement précieuse.
Vous l’aurez compris, ce n’est pas par hasard que Yann Yvinec a choisi le pseudonyme de Hyane. « La hyène est très tôt devenue comme un totem et un fil rouge dans ma pratique, je reviens très souvent à un portrait d’hyène entre deux autres sujets. Donc quitte à s’identifier autant aller jusqu’au bout. La sonorité est également la même que mon prénom (Yann=Hyane= Hyène en allemand). »
Hyane a vécu son enfance et adolescence en région parisienne. « Très tôt le dessin devient mon refuge et mon moyen d’expression, le dessin comme passion, un compagnon, une béquille, une manière de se sentir bon à quelque chose… » Après pas mal de circonvolutions, à 21 ans, Hyane quitte la région parisienne et intègre les Beaux-Arts de Saint-Etienne où il suivra un parcours tourné autour du design. Dans cette ville à taille humaine, riche de son terroir minier et ouvrier, il se sent bien. « La découverte d’une forme de liberté et la rencontre d’autres humains tout aussi perdus et inadaptés que moi… un noyau chaleureux et réconfortant, mes meilleurs amis encore aujourd’hui ». Avec le choix du design, l’artiste se rassure en répondant à des contraintes, un cadre… et aussi l’objectif d’avoir « un vrai métier ». On suivit quelques années « de bohème », riche en expériences diverses pour Hyane. Mais aussi une période où il va prendre conscience que le côté marketing ou « consommatoire » du design ne lui correspond pas… « Ne pas participer au grand cirque ! » exprime-t-il avec lucidité. Et Hyane de se souvenir de sa brève rencontre en 2017 avec Vladimir Velickovic. Il en avait été subjugué !
Nous contemplons toutes ses oeuvres. On se laisse vite perdre par cette intensité picturale. Le savoir-faire technique est ici au service absolu de la création. Le dessin c’est la base de tout. Hyane avoue prendre un plaisir infini au travail sur le papier, un bonheur immédiat, une liberté totale. Il lui a fallu du temps pour oser « se lancer, assumer de faire une oeuvre… Puis un jour, la conviction que mon travail peut être vu, l’envie de le montrer. » Comme souvent, on reste étonné par l’énergie explosive d’artistes qui paraissent plutôt réservés ! C’est avec la même énergie que Hyane s’est lancé dans la sculpture d’animaux en chanvre ! Pour lui, la sculpture comme le dessin « le fil de chanvre comme le crayon… le même tracé ».
Des hyènes, des bisons, des chimères, des oiseaux ou autres… montrés dans ce qu’ils sont et qui titillent notre imaginaire, nous emportent loin de la réalité. Tout un univers d’animaux capturés par le dessin et la sculpture, parvenant à créer un ensemble où les failles et les faiblesses règnent. Hyane dénonce les dérives de notre siècle avec une rare efficacité. Le rapport de l’homme au monde et ce qu’il en fait. Des oeuvres qui dégagent une énergie phénoménale. Humaniser l’animal sans le transformer… le montrer à l’état brut et confronter ses valeurs, ses apparences aux nôtres !
Des couleurs naturelles, des noirs… le fusain, l’encre de Chine ou encore le chanvre, l’artiste signe une écriture propre. Equilibriste, Hyane porte un regard qui ne se veut jamais cruel, pas de violence. « Je n’ai pas un travail engagé, je ne veux pas dénoncer, juste donner ma vision. Surprendre les regards.. » Et on vous le confirme c’est réussi !
Depuis que Hyane a décidé de ne plus se consacrer qu’à son art, il a trouvé une sorte d’équilibre personnel dans la reconnaissance de son travail d’artiste même si « le terme d’artiste, avec tout ce qu’il contient d’emphase et d’entre-soi, me met également parfois mal à l’aise ».
Nous vous invitons vivement à partir à la rencontre de Yann Yvinec, artiste discret, installé à Brest, ville et région chères à son coeur et à sa sensibilité.
En Une : Vue de l’exposition à La Galerie de Louise en 2022 – ©Photo Yann Yvinec
