Né à Trappes, et résident dans cette ville (jolie musarde à envisager !), le grand Marc a offert à sa ville natale un certain nombre d’œuvres, dont certaines sont exposées. Celui qui fut longtemps aux manettes du fameux Salon de Mai (disparu hélas en 2014), est un redoutable artiste, souterrain, envoûtant et fascinant.
Dans l’impossible de toute échappée, Giai-Miniet crée un prodigieux espace à gouffres. Il ne s’ouvre qu’au spectateur imprudent et stupéfié, unique témoin de ce somptueux théâtre de la cruauté, où la vie est aux arrêts. L’humaine pesanteur a pétrifié tous les rêves. On dirait toute lumière fabriquée à jamais assassinée. Art d’exorcisme à prodiges.
Des formes premières, archaïques, ténébreuses, et lourdement ondulantes, hantent l’œuvre entière de Marc Giai-Miniet. Un labyrinthe organique organise une très étrange circulation, obscure et charnelle, qui met sourdement la pression sur la peinture aimable. En courage et cruauté, Giai-Miniet n’écarte pas les malaises de soi et de sa civilisation. Il obsède un espace lourd où s’agitent d’étranges entités habitées de nuit. Ces lieux d’art comme les êtres sont clos sur eux-mêmes.
On dirait un chirurgien des abîmes, un sorcier sombre et maléfique qui travaillerait continûment, à l’insu des polices du jour, dans le malheur inassouvi de l’humanité.
Par la ténuité somptueuse de ses gris indéfinis, par ses formes nouées qui creusent l’énigme vitale, par ses mariages de lumière et de suie, cette peinture est un miracle de dure beauté, aride et délicate. Terrifiant sociologue, Giai-Miniet saccage les bassesses, et ses actes de création sauvent le vieux monde de nos linceuls.
En une : Solitaire aux taches noires – Acrylique sur bois – 122×122 cm
Jusqu’au 23 octobre 2021
Marc Giai-Miniet
Conservatoire de Musique et de Danse – Trappes (78)
