Le MAMC, Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Etienne, est l’un des tout premiers musées d’art moderne créé hors de Paris. Héritier des collections du MAI, musée d’Art et Industrie, lui-même successeur du Palais des Arts de 1833, le MAMC abrite quelque 20 000 œuvres d’art ancien et du XXème siècle. Derrière la façade habillée d’un quadrillage de céramique noire, hommage au passé minier, s’ouvrent d’immenses volumes lumineux (3000m2) qui permettent tous les défis.
Carte blanche a été donnée à Lionel Sabatté. Une cinquantaine d’œuvres sont produites spécifiquement pour l’exposition : peintures, oxydations sur plaques, dessins, installations.
Tout l’univers complexe de l’artiste, ses approches des cycles du vivant, minéral, végétal ou animal, est présent, en perpétuelle résurrection, sous le titre « Eclosion ».
Un châtaignier desséché surgit des pavés du hall. Cette essence locale, fragile et menacée, se couvre miraculeusement d’une floraison printanière. Renouveau artificiel, paradoxal et transgressif, né étonnamment de lambeaux de peau morte joliment agencés…
Dans la première salle, de grandes plaques oxydées, à l’origine destinées à l’industrie, nous plongent dans un univers caverneux et intemporel. Le processus de transformation est volontairement bloqué, mais l’illusion d’un encore possible changement d’état est bien là. L’un des triptyques intègrera les collections du Musée.
De même, les petites œuvres sur papier récupéré de l’artiste décédée Pierrette Bloch « Quelque part entre poussin et œuf au plat », peinture sur laquelle sont projetés de la poussière et du curcuma, donnent l’impression que la tache « bouge » encore.
La « nef », le plus vaste espace de l ’exposition, est traversée par « Le Mur des ouvertures ». Réalisé in situ, en ciment et fer à béton, matériaux pauvres qui reprennent vie, il ne sépare pas, mais bien au contraire, il articule l’espace et crée un échange de part et d’autre. De grandes figures déstructurées, désaxées, en rupture d’équilibre, émergent d’un magma volcanique, affichant leur volonté d’exister malgré tout.
Chez Lionel Sabatté, la volonté d’expérimenter et d’imaginer le monde autrement, de convoquer des matériaux improbables, rebuts divers, poussières, rognures, de les transformer, et de redonner vie sous une forme animale, reflète l’univers métamorphique de l’artiste.
On s’arrêtera en fin d’exposition sur le « Tissu », carré translucide et suspendu, offert à la lumière, fragments assemblés et collés de peaux mortes. Reflet d’une époque, besoin de régénérescence.
Beau catalogue édité, avec un entretien de la commissaire Aurélie Voltz. En lien avec la carte blanche de l’artiste, samedi 4 décembre 2021 à 16h, lecture d’extraits de « Zoologiques » d’Eric Chevillard.
Lionel Sabatté, « Eclosion » – Jusqu’au 2 janvier 2022
MAMC – Saint-Etienne métropole – Saint-Priest en Jarez (42)
En Une : Lionel Sabatté – Portrait 2020 – ©Rebecca Fanuele
