Diplômé en littérature et titulaire d’un doctorat en psychologie, Christopher Rothko vient de publier un remarquable ouvrage sur la vie et l’œuvre du grand Rothko, son père. Le livre d’intime et fort témoignage est évidemment lié à l’exposition Rothko de la Fondation Louis Vuitton, qui se termine en avril.
Classé trop rapidement parmi les représentants de l’expressionnisme abstrait américain, Rothko (1903-1970) refusait à juste titre cette catégorisation jugée “aliénante”, et son fils libère très justement son œuvre des interprétations erronées qui faussent le regard sur l’un des artistes majeurs du vingtième siècle.
Son catalogue raisonné recense 834 tableaux dont 424 avec ses fameux colorfield, le sommet absolu de son art et la raison de sa notoriété mondiale. C’était également un intellectuel qui aimait la musique, la littérature et la philosophie, plus particulièrement les écrits de Nietzsche et la mythologie grecque. Influencé par l’œuvre d’Henri Matisse (à qui il a d’ailleurs consacré un hommage dans l’une de ses toiles), Rothko occupe une place singulière au sein de la très célèbre École de New York, avec Jackson Pollock, Barnett Newman et autre Willem De Kooning. A la même époque, l’École dite de Paris est quasiment à la dérive et l’impact des “émigrés” américains (Rothko est né Markus Rotkovics en Lettonie) est énorme.
Christopher, le fils, s’appuie sur sa connaissance profonde de l’œuvre autant que sur sa compréhension instinctive et fusionnelle de l’homme qu’était son père. La cohérence artistique et intellectuelle de l’œuvre magistrale de Rothko est saisissante. “La relation de mon père à sa propre célébrité était pour le moins compliquée ; c’était une drogue désirée, mais hautement suspecte.”, écrit Christopher. “Pour appréhender l’œuvre de Rothko, je m’efforce toujours d’orienter le spectateur vers l’intériorité et l’universel”. Mission hautement réussie…
Éditions Hazan – Fondation Louis Vuitton – 29 €