Najah Albukaï est l’une des figures de proue de l’exposition « Itinérance » qui rassemble, à l’Académie des Beaux-Arts, des artistes de l’Académie de France à Madrid, section artistique de la Casa de Velázquez. De retour d’une année de résidence en Espagne (septembre 2021 – juillet 2022), les 13 artistes de la 92ème promotion investissent le Pavillon Comtesse de Caen pour une exposition conçue à la fois comme une restitution et un prolongement de leur immersion en péninsule Ibérique.
Dialogue ouvert et vivant.
Chez Najah Albukaï, qui a connu les geôles syriennes, la torture et l’exil, la base de l’œuvre est essentiellement graphique. Le dessin, en formidable témoignage, est féroce, acéré, durement inventif, véritables flashes éparpillés dans un espace d’une profusion et d’un poids obsessionnels uniques.
Actes d’art et de mémoire s’étreignent. Dans un espace envoûté toujours clos, dans une prolifération graphique à la fois répétitive et d’une extrême liberté, s’agitent à vif les esquisses affolées des victimes du monde.
Najah Albukaï porte des coups au cœur de l’art, par le dedans et l’en-deçà. La séduction n’est pas son fort, et la grisaille fiévreuse et habitée est son territoire. La voie de création est pure révolte, elle dit la part terrifiée de la vie, et l’inacceptable de la finitude. Najah Albukaï bien au-delà de l’art engagé, bouleverse l’illustration identitaire, et creuse l’opacité à coups de dessins nus, dans la proximité de Goya ou de Kubin. La noirceur habitée lui convient.
Art d’exorcisme, pour surmonter l’impensable des épreuves. Cependant Najah Albukaï sait mettre de la distance dans ses dessins, et de l’absolue compassion. L’énergie vitale n’abandonne pas ce et ceux qu’il ose montrer. Il joue du oud, et pour lui, l’humanité est indestructible. Son art dur et profond évolue. Beau livre publié sur lui.
Jusqu’au 5 mars 2023 – Itinérance – Pavillon Comtesse de Caen –
Paris 6ème
En Une : Couloir 227 – Encre et gouache – 2021 – 32×26 cm
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